Traces...

Ma pièce pour piano Traces... est terminée (7' environ). La partition sera bientôt disponible, pour l'instant voici la page de garde et le texte qui va avec:



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Lorsque Mauro Piccinini m’a proposé d’écrire une pièce pour piano qui figurerait sur le CD qu’il projetait d’enregistrer en hommage à Scriabine, il m’a parlé de Marina Scriabine, la fille d’Alexandre, elle aussi compositrice. Bien que naviguant parmi les compositrices depuis plusieurs années maintenant, en particulier comme membre de l’association Plurielles34, je n’avais jamais entendu parler de Marina Scriabine, contemporaine de Boulez, très érudite et composant dans le plus pur style sériel. Encore une compositrice inconnue me suis-je dit... J’ai découvert ensuite qu’étant petites, Marina et Adriadna, les deux sœurs, écrivaient des poèmes probablement sous l’influence de Marina Tsvetaeva, amie de leur mère. Comme je suis une grande lectrice et admiratrice des poèmes de Marina Tsvetaeva, j’ai dédié ma pièce « aux deux Marina ».

L’inspiration première est venue de mon leporello (en couverture de la partition), traces fortuites, fragiles, féminines (fff), un retournement du rôle premier du « leporello » : de la liste des conquêtes féminines de Don Juan, il devient un lieu d’expression d’une femme en tant qu’être.

C’est surtout l’aspect aléatoire de l’apparition des tâches de couleurs qui m’intéressait, que j’aurais voulu transcrire musicalement. J’aime la surprise de l’aléatoire, de l’imprévisible, elle repose l’œil, l’oreille. L’aléatoire offre aussi une grande liberté, permet de ne pas se trouver prisonnière d’un style ou d’un processus. Cependant, plus loin dans la pièce, viennent se glisser des passages dans le style jazz et romantique, comme des formes structurées peut-être nées de ce « chaos ». Ils m’apparaissent comme des cristaux enchâssés dans une pierre aux tâches et formes aléatoires.

Les « Traces » parlent aussi de la mémoire, de la sédimentation des souvenirs, de leur réapparition, des réminiscences. La trace se modifie au cours du temps, c’est ce qui reste de ce qui n’est plus là, ce qui reste des souvenirs, de plus en plus imperceptibles au conscient mais bel et bien sédimentés dans l’inconscient.